mardi 15 mai 2007

Au coeur de Soi

meyaya@iboga.org




Au début, quand je lisais ici et là que l'initiation à l'iboga pouvait équivaloir pour certaines personnes, à "dix ans d'analyse, moi qui me suis tapé 15 ans de psychanalyse, je me disais que si c'était vrai alors Mister Freud était passé sans doute passé à côté de l'essentiel ! Ca me plaisait pas mal de penser ça vu que la psychanalyse est un outil formidable super adapté à la pensée occidentale mais qui échoie presque toujours sur le contrôle par la pensée. La mémoire cellulaire, en thérapie verbale, reste sur le bord du chemin. Pourtant, c'est bien là que sont stockés les empruntes de traumas, les maux des mots pas dits et les autres dimensions de l'esprit allègrement oubliées par la science de Saint Thomas.
L'iboga ne m'était pas inconnue, et pour cause ! Née en plein coeur de l'Afrique, en brousse, à la manière locale, j'avais entendu parler de cette jolie plante depuis ma plus tendre enfance. Mais songer, il y encore 30 ans, qu'une blanche pouvait envisager de s'approcher voir de tester l'affaire par la cérémonie du M'bwiti relevait du petit délire. Pour les blancs bonne pensée-bon teint c'était une affaire de black et c'est tout !
Moi, petite fille déjà, habituée au monde étonnant et magnifique du végétal (ma mère était paysagiste et donc fine connaisseuse en botanique), rien ne me semblait plus naturelle que de comprendre ce que cette racine signifiait pour les africains.
Rentrée à l'adolescence de cette Afrique originelle, ma vie fut un long parcours d'apprentissages souvent difficiles et douloureux. Une longue période en psychanalyse suivie de divers stages dits de "développement personnel" ne m'avaient jamais complètement ouvert les portes d'une vraie perception du monde. Gênée depuis des années par un discret mais tenace film interne, la perception de ma réalité projetée sur l'extérieur ne cessait d'encombrer ma soif de sentir ma "nature profonde", celle d'avant les illusions du Moi si cher à Freud et ses disciples.
En novembre 2004, je réalise que la cinquantaine n'est pas juste un anniversaire de plus. Quelque chose en moi, malgré les satisfactions de ma vie professionnelle et privée, m'indique que des forces extérieures me signalent qu'un tournant est en train de s'annoncer mais je n'ai pas de bonne visibilité. Je suis dans le flou le plus total.
Je découvre, grâce à l'ouvrage de Vincent Ravalec, qu'une poignée de rêveurs formidables ont réussi à faire venir en France l'un des plus prometteurs Nganga gabonais, un dénommé Mallendi. L'initiation est proposée d'une façon authentique et super encadrée par des femmes et des hommes de coeur. Je n'hésite pas un instant, dépasse mes trouilles de citadines aseptisées et m'inscris au séminaire.
Un mois durant, tout en continuant mes activités habituelles, je me prépare. Interrogations en profondeurs, tris dans les objectifs, motivation et mobile de ma démarche. Comme beaucoup, j'ai une vraie appréhension : est-ce que c'est supportable ? vais-je pété un plomb ? serai-je malade comme une chienne ? ne vais-je pas finir par me prendre pour Joséphine de Beauharnais ? Ne vais-je pas être assaillie par des angoisses ? Autant de questions que toute personne habituée au confort de l'accompagnement feutrée à l'occidental se pose peu ou prou en se lançant dans une telle démarche.

Après deux jours et demi d'initiation, puis-je affirmer que "la femme nouvelle est née" ? D'une façon diffuse, je peux répondre OUI.
Je peux confirmer le témoignage de V. Ravalec en indiquant que chaque expérience est unique car elle traduit précisément l'aspect exceptionnel de chaque participant. En cela, l'iboga est une racine révélatrice. Elle ne vous apporte rien que vous ne sachiez déjà, pour peu que vous ayez accepté quelques fois dans votre vie d'écouter votre petite voie intérieure. L'iboga est un amplificateur de cette petite voie. Elle traduit avec son langage propre (visions, couleurs, scènes symboliques, sons vibratoires...) ce que notre nature profonde sait depuis la nuit des temps et que notre mode de vie a soigneusement étouffé. Mais la racine ne se limite pas à cette amplification, elle s'adresse au coeur. Et oui, cher(e)s ami(e)s "chercheurs" ! l'iboga est le fruit d'une longue conversation entre le monde immobile du végétal, de la terre, de l'air et du feu. Elle alimente le coeur par ce petit battement supplémentaire non pathologique qui est celui que vous ressentez lorsque vous êtes en état d'amour. Elle fait même encore mieux, elle vous laisse des effluves persistantes de ce sentiment d'amour longtemps après son passage dans votre corps et votre psyché. Les images indicibles qu'elle a fait naître devant votre vision close, ont toutes une signification précise. Pourtant, la racine ne livre pas forcément tout de suite les réponses, elle sait vous faire attendre. Non point pour générer de la frustration mais parce qu'elle "sait" que vous avez besoin de certaines circonstances du quotidien pour faire le lien ensuite entre l'image et votre réalité. C'est à ce moment que vous sentez le subtile changement qu'elle a opéré en vous à votre insu.

Bien sûr, comme tout le monde, vous serez "malade". Les deux nuits sans dormir vraiment, le jeûne nécessaire, la puissance de la racine qui telle un sang rouge carmin envahit votre organisme jusqu'à la nausée avant de vous "parler", tout cela est une vraie épreuve. Tout est là : se faire initier à l'iboga c'est accepter de se faire face, c'est dire oui au mouvement intérieur que tout esprit humain appelle lorsqu'on est perdu ou en souffrance.

On en revient, non pas transformé, mais élargi de partout. La sérénité qui s'installe doucement en nous après l'épreuve est comme un rendez-vous rêvé avec soi-même. Il n'y a pas d'effet "miracle" avec l'iboga, il y a mieux : l'harmonisation avec Soi. Et ce n'est pas rien, même pour les plus rationalistes d'entre nous, la racine ne traverse personne sans défibriller quelque chose ici ou là. Elle dépose en nous la nécessité d'une patience tranquille. Vous l'oubliez, croyant reprendre tout bonnement le cours de votre vie et la voilà qui resurgit au milieu de votre mental sous forme d'une réminiscence imagée qui vous chavire parce qu'elle vous dit alors "voilà, c'est ça que je te disais dans la nuit". Elle est allée arroser vos propres racines, vous rappelant que vous pouvez mentir à l'illusion qui nous entoure mais plus jamais à vous-même. Elle est patience elle-même car elle vous accorde le temps que vous voulez pour ajuster votre fil de vie au beau, au généreux, à l'empathie, à l'amour vrai.

L'iboga ne parle qu'à celles et ceux qui sont prêts. Si vous ne l'êtes pas, elle sait se faire oublier comme elle le fut pendant des siècles par les blancs qui ont cru partout dans le monde maîtriser la Connaissance et qui aujourd'hui se déchire pour un savoir de pacotille.

A toutes celles et ceux qui nous ont accompagnés, tenus par la main, parler en pleine nuit, laver nos miasmes, sortis de notre torpeur mentale : Gérard, Régis, Philippe, Sylvie, Emilie, Mallendi et son collaborateur, un grand Merci et à bientôt quelque part dans le monde...

Séverine Denis

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